Chapitre 6 : Les Vers de l’Ombre

(Où l’on découvre que les vers ont une armée, un hymne, et une obsession pour les couvercles de bocaux.)

UNE RUMEUR SOUS TERRE
Tandis que les branches tremblaient au rythme des intrigues politiques, sous terre, un murmure rampait à travers les racines.

Une voix sifflante, lente comme un discours d’escargot, se frayait un chemin jusqu’à un ancien terrier :

— “Il est temps… D’émerger.”

C’était Commandant Glu, le général des Vers de l’Ombre, un peuple souterrain oublié, considéré par beaucoup comme des asticots paresseux… à tort.

Installés dans un labyrinthe de galeries tapissées de feuilles de journal, ils affûtaient leurs armes : cure-dents, bouchons de liège, et morceaux de papier-bulle. Redoutables.

Leur devise ?

“Nous rampions, nous rampons, nous ramperons.”

LE PLAN : OPÉRATION COUVERCLE
Réunis autour d’un vieux couvercle de pot de confiture, les stratèges versifiants exposèrent leur plan.

Le but : infiltrer la surface, s’emparer du Grand Silo à Noisettes gardé par les marmottes insomniaques.

Commandant Glu traça le plan avec une goutte de bave sur une feuille de salade :

Phase 1 : creuser en biais.

Phase 2 : chanter l’hymne pour le moral.

Phase 3 : renverser un pot.

Phase 4 : faire diversion avec un mime.

Leur atout secret ? Rikiki, un ver contorsionniste capable d’entrer dans une serrure et d’en ressortir avec un cookie.

DE L’AUTRE CÔTÉ DU BOIS… UN DRAME SENTIMENTAL
Pendant ce temps, Castagnor revoyait Belladone dans un coin du tronc :

— “Tu es venue pour la paix… ou pour me trahir ?”

— “Pourquoi pas les deux ?”, répondit-elle en ajustant ses lunettes d’espionne.

Le silence se fit.

Puis un bruit sourd. Speedo, l’escargot porteur, venait de tomber dans un piège à raclette laissé par les putois.

— “Je me suis coincé la coquille… encore…”

UNE ALLIANCE IMPRÉVUE
À l’aube, alors que la forêt s’étirait et que les corbeaux faisaient leurs vocalises jazz, un ambassadeur inattendu arriva.

Représentant du Peuple des Vers, portant une cravate et une cape en peau de banane séchée, il demanda audience.

— “Nous souhaitons… une alliance. En échange… de recettes de compost… et d’espionnage tactique.”

Castagnor, méfiant, répondit :

— “Pourquoi maintenant ?”

— “Parce que l’odeur de roquefort a atteint nos galeries. On n’a plus le choix.”

Belladone sourit.

— “Moi je dis : on teste. Au pire, ils ramperont ailleurs.”

UN HYMNE ÉTRANGE
Pour officialiser l’accord, les vers entonnèrent leur hymne :

“Rampe, rampe, petit être gluant,
Dans la mousse ou dans les vents,
La noisette est notre passion,
Même si on n’a pas de dent.”

Jean-Rasoir éclata en larmes.

— “C’est… c’est magnifique. Tellement gluant. Mais vrai.”

ÉPILOGUE : UNE OMBRE ENCORE PLUS SOMBRE
Mais, dans les profondeurs du Marais des Mornes Matins, une silhouette observait tout… Le Crabe Ancien, exilé des plages, maître du silence et des pinces qui claquent.

Ses yeux globuleux clignèrent une fois.

— “Bientôt… mon tour.”