Jeux d’ombres et de plumes

Les jours suivants, la tension dans la ville devint presque palpable. Edmond, toujours fidèle à son poste, remarqua des changements subtils mais révélateurs. Les Silver Feathers étaient plus prudents, leurs déplacements plus calculés. Ils ne se regroupaient plus aussi librement qu’avant et évitaient certaines zones, comme s’ils savaient qu’elles étaient devenues trop dangereuses.

Les Black Talons, en revanche, semblaient avoir gagné en confiance. Ils prenaient possession des toits autrefois partagés et marquaient leur domination par des raids éclairs sur les territoires adverses. Edmond comprenait que ces attaques n’étaient pas seulement des démonstrations de force : elles faisaient partie d’une stratégie plus vaste visant à isoler les Silver Feathers.

Un soir, alors qu’il observait un carrefour en contrebas, Edmond aperçut un pigeon argenté perché sur un lampadaire, fixant un groupe de Black Talons qui se nourrissaient d’un tas d’ordures. Le pigeon argenté semblait hésiter, puis s’élança brusquement en leur direction, fonçant à toute vitesse. À la dernière seconde, il changea de trajectoire et disparut dans une ruelle étroite. À peine quelques secondes plus tard, un éclair sombre surgit de l’ombre : un Black Talon embusqué venait de rater son attaque.

Edmond comprit alors. Les Silver Feathers n’étaient pas seulement sur la défensive. Ils commençaient à s’adapter, à mener leurs propres embuscades. Un jeu d’espions et de contre-espions se mettait en place. Ce n’était plus seulement une question de territoire : c’était une guerre de ruse et de patience.

Cette nuit-là, Edmond prit une décision. Il devait aller plus loin. Il devait comprendre ce que les humains n’avaient jamais cherché à savoir.

Il prépara son matériel : une paire de jumelles perfectionnées, un carnet, et une lampe frontale à lumière rouge pour ne pas être repéré. Puis il quitta son appartement et se dirigea vers le plus grand nid de la ville : l’ancienne gare abandonnée, un lieu que même les chats évitaient.